CDR#19 : Faut-il changer d’identité pour réussir ?
Les 16, 17 et 18 février dernier j’étais au salon régional de l’étudiant comme exposant et conférencière. J’ai pu discuter avec des étudiants, des parents, des exposants et le constat m’a serré le coeur : Nos jeunes ont l’air perdu. Beaucoup se retrouvent au salon démotivés, se sentant obligés d’être là à cause de l’école ou des parents et ne profitent pas réellement de toutes les opportunités de rencontre, de formation (avec les conférences), de coaching qui s’offrent à eux. Ils ont l’air déresponsabilisé comme s’ils n’étaient pas acteurs de leur propre vie mais des spectateurs désintéressés.
Fort heureusement parmi cette majorité, il y a eu des exceptions et de belles rencontres d’étudiants engagés acteurs de leur succès, qui n’envisagent pas leur avenir comme faisant partie des statistiques de l’INSEE sur le chômage. Outre les universités étrangères, les banques et l’armée venus faire la grande séduction aux étudiants, une belle place a été gardée pour le coaching, la thérapie (association) avec des professionnels passionnés et motivés à amener une prise de conscience chez les jeunes. Et dans la mouvance de cette prise de conscience, nous avons eu droit à un débat de clôture passionnant entre les jeunes, les artistes de la scène musicale locale.
Et c’est d’ailleurs de ce débat dont je vais vous parler aujourd’hui car il m’a emmené à me poser la question : Sommes-nous en crise identitaire ? Avons nous honte de nous aimer et de promouvoir nos talents ? Faut-il changer d’identité pour réussir ?
[Q] Avant de nous parler des raisons qui vous poussent à penser que nous vivons une crise identitaire, pouvez-vous nous en dire plus sur ce débat ?
Il s’agissait d’un débat présidé par le chanteur Krys, organisé en collaboration avec les étudiants de licence 3 du DPLSH c’est à-dire du Département Pluridisciplinaire de Lettres, Langues et Sciences Humaines de Saint-Claude. Ce débat s’inscrivait dans le cadre d’un cours de syntaxe et d’expression, enjeux contemporains de la culture du maitre de conférence en lettres modernes Mme Laura CASSIN.
Les étudiants avaient invités des artistes de la scène musicale locale et les médias pour discuter de la relation aux médias et de l’expérience des jeunes artistes en tant qu’activistes dans le milieu musical guadeloupéen.
Les intervenants invités étaient : Kris, Matik, Kila de Gwada bel, Vinska, Méthi’S, Rachelle Allison et bien d’autres. A la suite de ce débat les étudiants vont préparer une note de synthèse qui sera diffusée sur Facebook et aux intervenants.
[Q] A l’issue de ce débat, qu’est-ce qui vous a amené à vous interroger sur le fait qu’il faudrait changer d’identité pour réussir ?
Durant le débat ce qui est revenu souvent c’était l’absence des médias au débat et le manque de communication entre les jeunes artistes et les radios. Les jeunes artistes trouvaient qu’ils ne recevaient peu ou pas du tout de soutien des radios et qu’ils devaient d’abord explosé sur le net ou ailleurs avant de pouvoir être diffuser par les radios et scènes locales.
Et pour illustrer cette détresse des artistes locaux, nous avons eu l’exemple d’une jeune chanteuse qui est intervenue pour nous confier que pour avoir accès aux radios locales elle avait dû changer son créole en adoptant un créole haïtien et son style musical pour être enfin accepter. Elle ne semblait même pas se rendre compte de l’énormité de la
situation. Et ce problème, on le voit chez les artistes mais également chez les professionnels, chez les étudiants : chez les guadeloupéens en général : Aimer l’autre plus que soi. Aider l’autre plus que soi.
Mais comment puis-je être le meilleur dans ce que je fais si je ne suis qu’une copie de quelqu’un d’autre ou du travail de quelqu’un d’autre ? je ne peux pas . Si on ne réapprend pas à être, à s’aimer et s’entraider localement, on ne travaille pas dans ses forces.
Et c’est ce que le groupe Kassav avait compris et c’est d’ailleurs pour cela que leur réussite a été aussi éclatante tout en conservant leur créole et leur identité unique. Alors à la question du jour : faut-il changer d’identité pour réussir, je dirais non il faut juste être la meilleur version de vous-même.
Et je conclurais avec un texte tiré du livre « the age of miracles » de Marianne Williamson : « Les frontières saines sont faites d’amour; elles marquent le respect, tant pour la personne qui les établit que pour celle à qui on demande de les honorer. Je crois qu’il vaut mieux rechercher une vie équilibrée, une paix avec nous-mêmes et avec nos proches; ensuite, lorsque nous tournons finalement notre attention vers le monde, nous sommes tellement plus en mesure de lui apporter davantage. Nous lui offrons une version améliorée de nous-mêmes.»